Le groupe de travail « Qualité de l’Enveloppe » du pôle Fibres Energivie a publié une nouvelle version de son Livre Blanc sur l’isolation. Celui-ci émet quatre recommandations pour une isolation globale et performante des bâtiments.
Rénovations : un rythme trop lent
La réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre ne pourra être atteinte sans une isolation globale et performante des bâtiments. Or, en France, plus de 5,2 millions de résidences principales sont présumées être des passoires thermiques. Malgré la politique d’aides mise en place par les pouvoirs publics, la rénovation énergétique des bâtiments reste trop souvent incomplète.
669 890 logements ont fait l’objet d’une opération de rénovation énergétique en 2022, mais seules 10% d’entre elles étaient des rénovations globales. Environ 90% des travaux effectués se limitent à de simples rénovations sans méthodologie d’optimisation de la performance finale. La majeure partie des subventions est allouée au chauffage, représentant 70% de leur volume, tandis que seulement 21% des subventions sont consacrées à l’isolation.
L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) estime aussi que 14 à 20% des logements présentent des moisissures visibles. Cette réalité perdure malgré la nouvelle réglementation RE 2020. Il reste en effet possible de construire des bâtiments neufs avec une isolation extérieure négligeant les pertes d’énergie au niveau des balcons, loggias et frontons.
C’est dans ce contexte que le groupe de travail « Qualité de l’Enveloppe » du pôle Fibres Energivie alerte sur la nécessité de changer de paradigme. Il vient de publier une nouvelle édition de son livre blanc sur l’isolation globale et performante des bâtiments. Au cœur de la chaîne de valeur du bâtiment, ce groupement rassemble près de deux cents adhérents œuvrant dans l’industrie, la recherche et la formation. Il émet ainsi à l’attention des pouvoirs publics quatre recommandations.
500 000 rénovations globales par an
La première serait d’adopter un plan choc pour l’éradication définitive des passoires thermiques avant 2034. Il s’agirait de réaliser 500 000 rénovations globales et performantes chaque année. Il faudrait pour cela arrêter le saupoudrage des aides pour les concentrer sur ce projet ambitieux de façon à obtenir un retour sur investissement significatif.
Afin de réaliser cet objectif, une solution envisagée consisterait à établir des zones expérimentales prioritaires. Celles-ci impliqueraient l’État, les collectivités locales, les bailleurs, les maîtres d’œuvre et les spécialistes de la rénovation thermique. Dans ces zones, la performance énergétique et économique des projets de rénovation serait systématiquement évaluée.
Prime aux travaux combinés
Une seconde action cruciale consisterait à instaurer une Prime Travaux Combinés (PTC). Celle-ci fixerait les étapes et l’ordre des travaux à respecter pour atteindre le niveau de performance BBC (Bâtiment Basse Consommation) dans les logements individuels ou collectifs. Les travaux seraient programmés selon un schéma préétabli : isolation des murs, des combles, ventilation, amélioration des parois vitrées, installation de systèmes de chauffage et d’eau chaude sanitaire utilisant des énergies renouvelables.
Les travaux seraient mis en œuvre en trois à quatre étapes sur une durée maximale de dix ans. La prime « PTC » serait progressive et proportionnelle aux revenus des ménages. Le projet serait soutenu par « Mon Accompagnateur Rénov' » pour assurer un suivi et une livraison de qualité.
Mettre à niveau la formation
Une troisième mesure consisterait à mettre en place un plan de développement et de formation pour une filière « Rénovation Énergétique Performante ». Il associerait industriels, artisans, opérateurs de formation, collectivités et les pouvoirs publics pour garantir la réalisation conforme des travaux et la performance des ouvrages.
Renforcer les exigences de performance
Enfin, une quatrième action viserait à assurer la compatibilité des nouvelles constructions avec la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC). Pour y parvenir, il est proposé de renforcer les critères de l’indicateur Bbio à chaque étape de la RE 2020 (2025, 2028 et 2031).
L’indicateur Bbio représente le besoin bioclimatique d’un bâtiment neuf. Il détermine les caractéristiques thermiques d’une construction neuve, dont découle son efficacité énergétique.
Ceci permettrait d’éviter la poursuite de la construction de bâtiments insuffisamment performants. Le traitement des ponts thermiques serait également renforcé, avec un objectif de résultat pour abaisser sans attendre les déperditions thermiques de 0,6 W/ml-°K à 0,4 W/ml-°K. Les méthodes de calcul théoriques (RE 2020, RT-EX, DPE…) seraient aussi mises à jour pour mieux refléter les consommations réelles et diriger les choix vers les modes de chauffage sobres.
Un commissionnement sur la qualité de l’enveloppe des bâtiments neufs serait imposé. Enfin, un label serait réinstauré pour permettre la mise en œuvre progressive de ces actions et préfigurer la réglementation post-RE2020.