Tergiversations et reculades : c'est le ballet qui semble présider à la mise en œuvre de la réforme des aides pour la rénovation énergétique des logements, entrée en vigueur début janvier. Les dernières précisions quant à son contenu définitif n'étaient alors connues que depuis quelques jours.

Cette rapide transition n'a pas laissé aux professionnels du secteur le temps nécessaire pour se préparer. Bien que le dispositif des Accompagnateurs Rénov' ait été annoncé plusieurs mois auparavant, il n'était pas prêt à absorber une soudaine augmentation de la demande. Les avertissements des artisans, relayés par la CAPEB et la FFB, n'y ont rien fait.

Un rétropédalage en 2 temps

Deux mois après la mise en place de cette réforme chaotique, le Gouvernement a avoué le 15 février son intention de faire marche arrière. Il reconnaît avec les artisans que "le processus de rénovation énergétique comporte désormais trop de lourdeurs administratives".

Quatre jours plus tard, le ministère de l'Économie et des Finances embrayait avec l'annonce d'une réduction du budget de MaPrimeRénov' d'un milliard d'euros, sur un montant initial de quatre milliards. Il s'agirait de "refroidir la machine", selon les termes du ministre Bruno Le Maire.

Une restriction budgétaire qui s'inscrit dans un plan d'économies plus vaste de 10 milliards d'euros, mais qui se veut cohérente. En effet, 300 millions d'euros du budget alloué à MaPrimeRénov pour l'année 2023 n'avaient déjà pas été dépensés, notamment en raison des lourdeurs administratives. En raison de la complexité accrue due à la réforme, il était prévisible que le budget de cette année ne serait pas entièrement utilisé.

Évolutions des aides à la rénovation, encore

Trois assouplissements ont été évoqués le 15 février. Ils entreront en vigueur courant 2024.

  • Faire appel à un Accompagnateur Rénov' ne sera obligatoire que pour les gros projets. De nombreux ménages devraient ainsi pouvoir bénéficier de MaPrimeRénov' sans être accompagnés.
  • Le label RGE sera simplifié, notamment pour les petites et moyennes entreprises
  • Certaines restrictions de financement concernant les gestes de rénovation simples et efficaces seront levées. Comme avant, une rénovation mono-geste bénéficierait ainsi plus largement de l'accès à MaPrimeRénov'.

Les arbitrages finaux sur ces évolutions seront présentés en détail début mars. Normalement.

Professionnels et ménages pénalisés

Ces ajustements sont bien sûr nécessaires pour prévenir un blocage du marché. Les professionnels de la rénovation regrettent toutefois vivement ces hésitations qui rendent la situation confuse pour les candidats à la rénovation globale.

Depuis le 1er janvier, les artisans appliquent tant bien que mal la réforme. Devant le rétropédalage annoncé, ils devront une nouvelle fois tout revoir.

Les pouvoirs publics ne semblent pas mesurer l'impact de leurs décisions et des conditions d'application. Les entreprises sont mises dans l'incapacité de s'organiser pour construire leurs offres, organiser les équipes et mettre en place des procédures de gestion de projet. Elles supportent également des coûts qui deviennent du gaspillage, ne serait-ce que pour ajuster leur communication, mettant en danger des emplois voire la viabilité de la société.

Cerise sur le gâteau, le message adressé aux Français est confus. Ce qui affaiblit encore un marché en quête de respectabilité suite aux mauvaises pratiques de certains acteurs économiques. Les ménages perdent confiance à la fois dans les entreprises et dans le dispositif d'aides. Ils hésitent à poursuivre leurs projets, préférant attendre une clarification ou renoncer à leurs travaux.

Pour l'heure, Lionel POLITI rassure les ménages qui souhaitent rénover leur logement. "Il n'est pas opportun d'ajourner votre projet", souligne en effet le dirigeant d'ACTIV. "Au contraire, les dernières annonces du Gouvernement laissent entrevoir une simplification du parcours des aides pour de nombreux projets. Nos conseillers sont à l'affût et vous tiennent au courant des évolutions en cours."