En septembre, le président de la République et la Première ministre ont présenté le "Plan France Nation Verte". Celui-ci, censé incarner la vision écologique ambitieuse du gouvernement, vise à atteindre la neutralité carbone d'ici à 2050. Ce moment a été marqué par la publication quasi simultanée de plusieurs rapports alarmants éclairant la situation environnementale de la France.

Le rapport du Haut Conseil pour le Climat (HCC) dresse un bilan complet de l'évolution climatique et des mesures entreprises pour y faire face. Lui aussi propose des stratégies pour atteindre l'objectif fixé pour 2050. Le 4 octobre, une mission parlementaire d'information a présenté à son tour ses conclusions. Mettant l'accent sur la rénovation énergétique des bâtiments, elle présente des recommandations cruciales.

Le secteur du bâtiment contribue de manière significative aux émissions de CO2 nationales, à hauteur de 16 à 18%. La France compte 27,1 millions de logements classés de D à G en termes d'efficacité énergétique, dont 7,2 millions sont considérés comme des "passoires thermiques".

L'objectif fixé en 2015 de rendre ce parc immobilier neutre en CO2 pour 2050, avec l'éradication des passoires thermiques d'ici à 2028, est un défi colossal. Pour y parvenir, la Loi requiert depuis 2017 un rythme annuel de 500 000 rénovations performantes, avec l'ambition de parvenir à 900 000 d'ici à 2030. Cependant, un simple calcul révèle qu'il en faudrait plus d'un million par an dès maintenant pour ne pas prendre de retard.

Chaque année, le rapport annuel de l'Anah confirme ce rythme insuffisant. Les programmes d'aides actuels favorisent les rénovations monogestes, principalement axées sur le chauffage au détriment de l'isolation et des rénovations globales et performantes. La Mission Parlementaire, tout comme le Haut Conseil pour le Climat, souligne cette problématique. En 2021, 20 milliards d'euros ont été investis dans la rénovation énergétique en France. Une avancée significative, mais jugée insuffisante par les députés pour atteindre les objectifs nationaux.

Des idées pour la rénovation des bâtiments

Le rapport de la Mission d'information propose pas moins de 47 idées pour promouvoir l'isolation et la rénovation performante des bâtiments. Certaines sont en ligne avec les propositions d'ACTIV formulées précédemment.

Mettre l'accent sur les rénovations globales

Les rapporteurs recommandent d'augmenter le nombre de rénovations globales et performantes. Pour ce faire, elles proposent d'inscrire une orientation claire en faveur de la rénovation énergétique dans le cadre normatif existant. Cette orientation pourrait inclure des critères liés aux matériaux biosourcés et à l'adaptation au changement climatique.

Viser la sobriété plutôt que l'électrification

La Mission préconise aussi une approche de la rénovation basée sur la sobriété et l'efficacité énergétique. Elle estime que l'électrification du chauffage des logements, comme le propose le gouvernement, n'est pas la solution la plus efficace. Dans cette perspective, un changement de paradigme dans la politique énergétique est jugé nécessaire. Il s'agit d'abandonner le modèle centralisé, visant à produire de l'énergie à grande échelle. S'y substituerait une approche décentralisée pour réduire la consommation d'énergie au niveau local.

Des ressources humaines en adéquation avec le projet

Le HCC et la Mission d'information ont chacun identifié deux obstacles majeurs à la transition énergétique dans le secteur du bâtiment.

  • Manque d'exigences de qualité dans les travaux de rénovation, qui entraîne des performances énergétiques insuffisantes
  • Disponibilité limitée des compétences nécessaires, qui ralentit le rythme des rénovations

Le remède passe par une augmentation du nombre de personnes suivant des formations initiales ou continues à la construction durable et à la rénovation. L'attribution du label RGE aux entreprises pourrait être conditionnée à un ratio de personnes qualifiées RGE au sein de leur personnel. Cette condition renforcerait la confiance dans la qualité des travaux de rénovation car elle garantirait que ceux-ci sont réalisés par des professionnels compétents.

Diminuer le reste à charge

En ce qui concerne les aides publiques, il est essentiel de réduire le reste à charge qui freine l'engagement des travaux d'amélioration thermique. La Mission recommande d'examiner la proposition de création d'une avance pour la rénovation énergétique des logements. Cette préconisation est en ligne avec la demande d'ACTIV visant à préfinancer les aides pour faciliter le démarrage des travaux.

ACTIV avait aussi demandé d'augmenter le budget alloué aux aides à la rénovation globale. La mission parlementaire recommande une hausse du montant des crédits budgétaires alloués à MaPrimeRénov à 4,5 milliards d'euros à partir de 2024.

Cela reste néanmoins insuffisant pour atteindre les objectifs de 2050. Le budget annuel nécessaire pour les atteindre s'élèverait selon l'Ademe de 38,4 à 43,4 milliards d'euros. Pour s'en rapprocher, les rapports plaident en faveur d'une loi de programmation pour augmenter les dépenses annuelles de l'État à 14 milliards d'euros d'ici à 2030.

MaPrimeRénov' évolue en 2024

Le Gouvernement, de son côté, vient d'apporter des premières réponses. Il annonce un budget de 5 milliards d'euros pour la rénovation énergétique en 2024, assorti d'une évolution du dispositif MaPrimeRénov'.

  • Accompagnement renforcé tout au long du parcours de rénovation
  • Meilleure focalisation sur les passoires thermiques
  • Prise en compte du confort d'été
  • Introduction d'un pilier "Performance" pour les rénovations en une ou deux étapes
  • Mesures visant à saisir les moments opportuns pour la rénovation.
  • Renforcement des contrôles et des mesures d'impact

Le chemin vers une rénovation énergétique efficace et durable est encore long. Les propositions actuelles et les annonces récentes semblent toutefois montrer que la mesure du problème est prise. Reste à espérer que le gouvernement poursuivra durablement dans cette voie, avec des mesures fortes et ambitieuses, pour que l'effort soit pérenne.